利根川

Lundi 3 mai, en pleine Golden Week, départ matinal vers le fleuve Tone après avoir bien regonflé les pneus du vélo, parce qu’il vente pas mal fort et qu’avec des pneus mous contre le vent, ça peut être pénible.

Je prends la piste cyclable du Canal Tone sur quelques kilomètres, la quitte pour couper à travers le centre d’observation des cigognes sans m’arrêter, essaie de me rappeler par où je passais quelques années plus tôt pour rejoindre l’autre piste cyclable sur le fleuve Tone, regrette un peu de ne pas avoir réinstallé mon GPS, m’aventure dans une rue très étroite et tombe sur un portail religieux un peu tape-à-l’œil, que j’aurais raté si j’avais eu le GPS. Avec un demi-sourire en coin ou un sourire en demi-coin, je me fais la demi-réflexion que c’est mon premier temple cubiste, ça me demi-console et je repars.

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Je trouve la piste un peu plus loin en coupant cette fois-ci à travers la route intérieure d’un terrain de golf, et continue de pédaler contre le vent jusqu’à un double pont, celui des voitures fraîchement repeint et celui des vélos et piétons, affreusement rouillé, qui attend son tour.

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Il attend son tour, et ça me fait penser à un récent sondage, où 70 % des Japonais interrogés se disaient un peu frustrés que la vaccination contre la COVID-19 démarre si lentement ici… mais où 50 %, en même temps, ont répondu que quand leur tour viendra ils attendront un peu, histoire de voir si c’est vraiment sans danger…

De l’autre côté du pont, je repars vers la droite, vent dans le dos cette fois-ci. Ça roule bien, mais comme le soleil se met à faire miroiter une rizière, j’arrête le vélo et prie pour que les scintillements apparaissent sur la photo.

Ça marche. Pas aussi éblouissant et réjouissant sur la photo que ça l’était directement sur la rétine, mais bon.

Un peu plus loin, un tracteur rouge fend l’air à 5 ou 6 km/h. À cause du vent.

Derrière moi le mont Fuji, mais devant moi sur la photo, tout au fond, le mont Tsukuba. Du même nom que la prestigieuse Université Tsukuba, et on devine lequel a donné son nom à l’autre… Ce que par contre je n’avais pas deviné en 1996, c’était le véritable sens d’un courriel reçu d’un prof de l’Université Tsukuba, qui m’annonçait que je pouvais aller y étudier avec ma bourse du ministère de l’Éducation. J’avais interprété ce courriel comme un « peut-être » prudent à ma demande d’admission, tandis que celui d’une autre université moins cotée, Hōsei, était clairement une acceptation, sans équivoque et très enthousiaste. Grosse erreur de ma part, puisqu’après que j’aie opté pour Hōsei et flushé Tsukuba, une amie japonaise à qui je montrais le courriel de Tsukuba me dit que non, j’avais mal interprété, la réponse de Tsukuba n’était ni prudente ni équivoque, le prof s’engageait à se charger de mon admission.

Pourtant, j’avais déjà derrière moi plusieurs années d’étude de la langue. Comme quoi l’ambiguïté est toujours un problème en japonais, surtout quand on n’est pas Japonais. Au fil des ans ça s’améliore, on apprend à lire de mieux en mieux entre les lignes, mais jamais parfaitement, je veux dire jamais aussi bien qu’un Japonais. Mais ça vaut aussi dans l’autre sens : pour un traducteur ou une traductrice japonais(e), le français n’est pas toujours limpide, loin de là, et une petite virgule mal placée peut vite vous égarer.

Au retour, vent de face jusqu’au pont puis dans le dos de l’autre côté. Ça tombe bien, j’ai perdu l’habitude du vélo et la fatigue d’hier est restée quelque part dans les jambes.

J’aperçois bientôt un cultivateur sur sa repiqueuse motorisée. Dommage, le zoom de mon Lumix DMC-LX3 manque de puissance, sinon on verrait bien (mieux) les plants de riz à l’arrière de la machine. Il faut savoir que le riz est d’abord planté en un tas bien serré dans un petit coin de la rizière. On l’y laisse pousser jusqu’à la hauteur désirée (comme sur la photo d’hier), puis on le charge à l’arrière de la repiqueuse pour le replanter dans la boue du champ irrigué. Le niveau d’eau est contrôlé par des robinets d’irrigation et des canaux d’évacuation tout autour des parcelles. Dans quelques semaines on ne verra plus l’eau, tout serra d’un vert uniforme et ondulant dont on ne se lasse jamais. En tout cas pas moi.