Ah ! comme la neige a mizoré !
Cette photo de Grincheux prise le 7 janvier dernier n’a pas grand-chose à voir avec ce billet, si ce n’est qu’il y est question de neige. Grincheux et moi avions profité de cette jolie couche blanche pour aller rouler-glisser sur les petits sentiers du centre d’observation des cigognes, à quelques km de la maison.
Cette neige n’a pas fait long feu, mais aujourd’hui (10 février) la météo annonçait « みぞれ » (mizore), c’est-à-dire une neige qui tombe en fondant ou qui fond en tombant.
Au Québec, nous disons « neige fondante ». Or, si j’en crois les dictionnaires, on dit aussi (et surtout) « neige fondue » ailleurs dans la francophonie.
Pour un Québécois, une neige fondue ça serait plutôt, euh… une neige qui a fondu au sol au bout d’un certain temps, et non une neige qui fond en tombant ou dès qu’elle touche le sol.
J’ai fait le test en demandant un avis impartial sur la question, en l’occurrence celui de mon Adorable élève de conversation française. Pressée de faire le choix entre « neige fondante » et « neige fondue », elle a sans hésiter opté pour la « neige fondante » et accordé la victoire aux Québécois, ce qui ne se produit pas tous les jours au Royaume de la poutine.
Dans Wikipédia, みぞれ renvoie à « neige mouillée » en français, à mi-chemin linguistiquement entre les flocons de neige et les gouttes de pluie. Mais en lisant un peu dans le détail, on se rend compte assez vite que les définitions ne se chevauchent pas parfaitement.
En français, toujours selon Wikipédia, la « neige mouillée » se forme dans la « couche de fusion », définie comme suit :
(…) couche d’environ 500 mètres d’épaisseur à partir de l’isotherme 0 °C dans laquelle les flocons de neige fondent. Cette couche est généralement située entre 3 000 et 3 500 mètres d’altitude dans les conditions normales de température en été dans les latitudes moyennes (…) Lorsque la couche de fusion est à 500 mètres ou moins du sol, les précipitations sont un mélange de neige fondue et de pluie dont le rapport dépend de la hauteur au-dessus du sol de son sommet.
Passons sur la clarté douteuse de cette explication (« … dont le rapport dépend de la hauteur au-dessus du sol de son sommet » étant un peu indigeste), et allons plutôt du côté du Wikipédia japonais, où l’on nous explique en termes clairs que la mizore se produit souvent lorsque la température se situe entre -6 et -3 degrés Celsius à 1 500 mètres d’altitude et qu’elle est de 0 degré ou plus au sol. On y dit également que le phénomène désigne soit la neige qui se transforme en pluie, soit l’inverse.
Bref, pour bien rendre le sens (la signification météorologique) de mizore en français, il nous faudrait un mot ou une expression qui désigne à la fois une neige qui se met à fondre ou une pluie qui se met à… floconner.
La version japonaise de Wikipédia nous apprend aussi qu’Okinawa est la seule région du Japon où l’on n’a jamais observé de vraie chute de neige, mais qu’en revanche on y a observé des chutes de mizore à deux reprises : en février 1977 et en janvier 2016.
Mizore désigne aussi deux choses dans le vocabulaire de l’alimentation, dixit Wikipédia :
- 1 : un kakigōri recouvert de sucre candi (le kakigōri correspond à la « sloche » du Québec… celle qui se mange, pas celle dans laquelle on marche au printemps) ;
- 2 : le radis râpé (大根おろし).
Tout ça pour dire que la prochaine fois que la météo nous enverra un peu de mizore, nous irons rouler à vélo en imaginant qu’une gentille divinité hivernale, quelque part dans les nuages, nous râpe du radis sur la tête.
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