印税 2

Hier, j’ai traduit 印税 par « redevances », et un bon ami français m’a informé par courriel qu’il s’agissait plutôt de « droits d’auteur ». Il avait tout à fait raison, mais je me suis quand même demandé pourquoi j’avais traduit par redevances…

Il faut dire d’emblée que je pense et écris en français du Québec, et que mes principales références, outre le vocabulaire accumulé entre mes deux oreilles au cours des années 1960, 70 et 80, sont le Multidictionnaire de la langue française, Usito, Le Grand Dictionnaire terminologique, Termium Plus® et Druide Antidote. (Je consulte évidemment Le Petit et le Grand Robert(s) régulièrement.)

Or, pour la définition de redevance, le Petit Robert donne ce qui suit :

  • somme qui doit être payée à échéances déterminées (rente, dette, etc.) ;
  • taxe due en contrepartie de l’utilisation d’un service public. Redevance audiovisuelle ;

tandis qu’au Québec, les ouvrages québécois mentionnés ci-dessus incluent plusieurs autres sens, dont celui qu’il revêt en droit en tant que « somme payée pour l’utilisation d’une propriété intellectuelle ». Pour sa part, l’Office québécois de la langue française définit le terme comme suit (toujours dans sa connotation juridique) : « somme à payer au propriétaire du droit d’auteur d’une œuvre, d’un brevet ou d’une marque ».

J’ai quitté le Québec depuis bientôt un quart de siècle (dit comme ça, j’ai l’air d’un vieillard nippophile tout ratatiné derrière sa grande barbe blanche), mais si ma mémoire ne me joue pas de tour, il me semble qu’on y confondait souvent, du moins à l’oral, les notions de droit d’auteur et de droits d’auteur, la première correspondant au copyright (著作権) et la deuxième aux redevances (印税). Quoi qu’il en soit, en lisant le texte japonais sur lequel se basait le billet d’hier, je traduisais dans ma tête 著作権 par droit d’auteur et 印税 par redevances, pour éviter la confusion et l’homophonie cérébrale engendrées par l’alternance du droit d’auteur et des droits d’auteur.


Cela dit, hier nous n’avions pas encore terminé notre tour d’horizon sur le thème des redevances, puisque nous avons parlé de celles qui s’appliquent aux auteurs japonais (selon l’auteur du livre 作家の収支), aux traducteurs japonais d’ouvrages français (selon les informations dont je dispose « par la bande », vivant depuis deux bonnes décennies avec une traductrice japonaise spécialisée dans la combinaison FR-JP), mais pas de celles (je parle des redevances pour ceux qui ont oublié le début de la phrase) qui s’appliquent aux auteurs japonais traduits et publiés en anglais à l’étranger (sans doute aux États-Unis, même si l’auteur de 作家の収支 ne le précise pas).

Dans ce dernier cas, contrairement au Japon, où le taux des redevances demeure identique d’une impression à l’autre, ledit taux varie à la hausse au fil des impressions, commençant à environ 6 % (compte tenu du fait que l’éditeur étranger doit aussi payer des redevances à la personne qui traduit l’ouvrage), mais augmentent graduellement par la suite, disons à 7 % pour une deuxième impression, puis à 8 % une fois franchi un certain cap, par exemple celui des 10 000 exemplaires.

La chose est tout à fait logique du point de vue de l’éditeur, dont les coûts de production sont plus élevés lors de la première impression. Quant à l’auteur, s’il se vend bien il peut considérer ces hausses graduelles du taux de redevances comme autant de « primes » d’incitation à écrire des ouvrages qui, justement, se vendent bien, ou, au contraire, s’il se vend moins bien, il peut se sentir lésé que le taux de redevances pour la première impression ne récompense pas bien son dur labeur quel que soit le destin (succès) de l’ouvrage sur le marché, avec pour corollaire l’acceptation d’une diminution graduelle dudit taux par la suite, puisque de toute façon son travail d’écriture est terminé et que la réimpression n’ajoute pas un iota à son labeur.


Je termine par un retour à mon mystérieux lecteur français (lecteur anonyme de ce blog anonyme), lequel m’a appris par le détour de l’ATLF (Association des Traducteurs Littéraires de France) que le traducteur français, lui, est payé selon le nombre d’exemplaires vendus (et non d’exemplaires imprimés), et qu’il reçoit un à-valoir (前払い分 en japonais, acompte en québécois) dont le montant peut varier notamment selon la longueur et la difficulté du texte et/ou la compétence et la notoriété du traducteur. Chose impensable, je crois, dans le monde de la traduction littéraire au Japon…