Arakawa — 荒川

La petite maison dans la prairie

L’autre jour, par un samedi matin radieux, Grincheux m’a dit qu’il se sentait d’attaque pour se taper une bonne centaine de kilomètres, et qu’il aimerait aller du côté de Tokyo pour faire changement.

100 km, pour un petit vélo pliant à roues de 14 pouces, c’est beaucoup… Mais n’en faisant qu’à sa tête, il est aussitôt parti en lion vers la piste cyclable et, à peine mon café avalé, j’ai dû m’accrocher tant bien que mal à son guidon fringant pour le suivre.

Grincheux part en lion vers Tokyo

Chība-kun (チーバくん), la mascotte de la préfecture de Chiba, est un chien directement inspiré de la topographie aérienne, les limites administratives préfectorales épousant les formes du canin tel que vu à vol d’oiseau. Notre ville, Nagareyama, se trouve juste sous son museau, en plein dans les narines. La langue du canin, elle, trempe et l’abreuve dans la baie de Tokyo.

Pour Grincheux, les options (pistes cyclables) sont pléthore : la limite ouest de la préfecture suit le cours du fleuve Edogawa (江戸川) vers le sud jusqu’à la baie de Tokyo; la limite nord longe le fleuve Tonegawa (利根川) d’ouest en est jusqu’à l’océan Pacifique; et Grincheux peut aussi faire une grande boucle d’une soixantaine de kilomètres tout autour du museau (la partie en noir), dont la base correspond au canal Tone (qui relie les deux fleuves).

Nous quittons donc les narines de Chība-kun le long du canal et prenons la direction sud jusqu’à Kanamachi (金町). Bien qu’il y ait beaucoup d’exceptions à la règle, la densité urbaine ou la promiscuité résidentielle, si l’on veut, augmente à mesure que l’on approche de Tōkyō.

La Skytree, derrière les habitations qui se donnent du coude

Il faut dire que Grincheux a un faible pour les maisons. Lorsqu’il en aperçoit une qui lui plaît, il freine sans prévenir et m’intime l’ordre de la prendre en photo.

Parfois c’est une petite maison banale, toute en verticalité, qui a pour voisin un parc de stationnement étagé et squelettique.

Or, ce matin-là, c’est une maison toute neuve et minuscule, avec stationnement intérieur, qui le fait freiner brusquement. Le proprio devait vraiment vouloir habiter dans ce coin-là pour s’y faire construire une demeure qui a toute juste les dimensions de la rallonge du voisin de droite…

Un peu plus loin, nous coupons à travers le quartier de Tora-san (Katsushika Shibamata) et continuons jusqu’à la sinueuse rivière Nakagawa (中川), qui elle-même débouche sur le fleuve Arakawa (荒川).

À partir de là, Grincheux peut rouler sur la piste cyclable la plus fréquentée de Tokyo. C’est aussi la plus cosmopolite, nous rappellent deux cyclistes qui nous dépassent à vive allure sous un bel accent belge.

Ici et là, on constate de visu qu’avec le réchauffement planétaire, Shitamachi (la ville basse des quartiers populaires) va devoir élever sa digue encore plus haut si elle veut rester bien au sec.

Nous filons comme ça sur la rive ouest du fleuve Arakawa jusqu’à la ville de Toda (戸田市), faisons une pause bentō pour refaire le plein d’énergie puis revenons par la rive est, dont la piste, un peu moins bien aménagée, réserve quand même de belles surprises à Grincheux, notamment cette maison littéralement encerclée par une affreuse usine. Amusés, nous décidons d’un commun accord de l’appeler « La petite maison dans la prairie »…


Le petit conseil de Grincheux

Avant de partir, vérifiez la météo sur le site tenki.jp en spécifiant votre destination. Une des options permet de connaître à l’avance la vitesse et l’orientation des vents par tranches de trois heures (et même d’une heure). Je m’assure toujours d’avoir autant que possible le vent dans le dos de mon cavalier sur le chemin du retour.


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