Mont Tsukuba et rivière Kokaigawa — 筑波山と小貝川

En ce splendide samedi 23 avril, Béni-le-rouge et votre humble rouleur sommes allés nous dégourdir roues et jambes du côté du mont Tsukuba. Comme le montre la carte, nous avons d’abord roulé sur une vingtaine de km jusqu’à la gare JR de Toride (取手駅), puis sommes descendus à celle de Tsuchiura (土浦駅) pour 80 km supplémentaires de bonheur sur deux roues.

En fait, ce n’était pas le plan initial. Il était prévu de descendre du train un peu plus au nord, à la gare JR de Kandatsu (神立駅), mais comme nous avions perdu beaucoup de temps avec un détour complètement inutile entre la maison et la gare de Toride (quand j’essaie d’improviser un raccourci, ça se traduit pratiquement toujours par un long détour), il a fallu ajuster notre programme de la journée.

Ce sont ces statuettes de chouettes (梟), devant la gare de Toride, qui ont prévenu Béni pendant que je préparais son sac pour l’y mettre.

  • Chouette de gauche : Bonjour monsieur K3…
  • Béni : Je vous en prie, appelez-moi Béni.
  • Chouette de droite : Et où allez-vous comme ça, Béni-3 ?
  • Béni : Pas Béni-san, ni Béni-trois, juste Béni… Nous allons jusqu’à la gare de Kandatsu , d’où nous allons rouler vers le nord-ouest jusqu’au pied du mont Tsukuba, grimper un peu à flanc de montagne, puis redescendre vers le sud, le long de la rivière Kokaigawa.
  • Chouette de gauche : Oh ! Quel dommage, vous venez juste de rater le train qui continuait vers le nord après Tsuchiura. Le train suivant s’arrête malheureusement à Tsuchiura, donc vous allez devoir y attendre le prochain train une bonne demi-heure sur le quai.
  • Béni : ! …
  • Petite chouette juchée : C’est vraiment pas chouette, ça. Hi-hi !

Et v’là-ti-pas que Béni-le-gamin éclate de rire, pendant que moi, déçu de ce fâcheux contretemps, je réfléchis à un Plan B pour la journée.

Gare de Tsuchiura, centre névralgique de la Ring Ring Road

Ce Plan B improvisé a pris la forme d’une descente à la gare de Tsuchiura, pour y prendre la Ring Ring Road, cette ancienne ligne de chemin de fer transformée en piste cyclable.

Pendant que je sortais Béni de son sac, un jeune homme s’est approché timidement, et, pointant du doigt son propre sac, a dit qu’il avait exactement le même vélo que moi… même modèle, même couleur et tout. Ce jeune homme n’était pas un cycliste, mais un pêcheur qui trouvait son petit vélo bien pratique pour prendre le train et aller taquiner le poisson un peu partout. Nous avons bavardé une bonne dizaine de minutes en vantant à qui mieux mieux les qualités de nos montures identiques, tellement que j’ai même eu l’impression que Béni était encore un peu plus rouge que d’ordinaire sous cette pluie d’éloges.


Des deux côtés de la Ring Ring Road, les couleurs de la fin avril s’en donnaient à cœur joie dans les champs et rizières.


Près du mont Tsukuba, juste après un grand étang (大池), une petite route sinueuse à flanc de montagne lançait un défi aux cyclistes.

  • Dis, Béni… on y va ?
  • Moi ça n’me dérange pas, parce que c’est pas moi qui pédale… mais la dernière fois que tu t’es improvisé grimpeur, hein…
  • Je sais, je sais… C’est pas grave, essayons, on verra bien.

Deux cyclistes nous ont alors dépassés, en se demandant à qui je pouvais bien parler comme ça.

  • Sans doute des cyclistes unilingues qui ne parlent pas à leur vélo, a chuchoté Béni sur un petit ton condescendant.

Comme le disait l’affiche, c’était une montée de 3,8 km, avec une pente d’environ 7 degrés et un dénivelé d’environ 240 mètres. Sur le trajet, chacune des 31 courbes à franchir était numérotée, pour encourager (ou décourager, c’est selon) les grimpeurs.

Nous nous sommes donc lancés dans la montée avec fougue et, deux minutes plus tard, le souffle court et la fougue dissipée, j’ai réalisé que la prise de photos… ça serait pour la descente.

Bref, quelques « non-photos » plus tard, nous sommes arrivés dans la trente et unième et dernière courbe. J’avais les jambes en feu, cette ultime courbe ne semblait jamais vouloir se terminer, j’avais le moral dans les pédales (c’est un peu plus bas que les talons)… et me suis donc arrêté.

Or, une immense déception nous attendait à peine quelques dix ou vingt pas plus loin…

  • Aaaaargh ! Il restait tout juste une vingtaine de mètres avant la fin de la montée ! Cette maudite courbe me cachait le fil d’arrivée ! Si j’avais su…

Et Béni-le-rouge de rire sans pouvoir s’arrêter…

À la sortie de la trente et unième courbe, des cyclistes faisaient la pause sous une route surélevée.

La montée reprenait de plus belle sur une distance de 5,6 km pour les grimpeurs courageux, catégorie à laquelle nous avons sagement jugé ne pas appartenir, d’autant plus qu’un mini-vélo 3 vitesses n’est pas l’idéal dans ce genre de situation (quelques cyclistes bedonnants nous avaient fait réaliser la chose en nous dépassant sans effort).

Dans la descente, nous avons pris quelques photos.


Et même une vidéo, en écoutant les oiseaux.


Tout en bas, il y avait une aire de repos pour cyclistes devant les ruines de Hirasawa Kanga.

Voulant aller me soulager dans les toilettes du petit centre d’information touristique, je me suis trompé de porte et, croyant entrer dans les toilettes, me suis retrouvé dans le bureau de l’administration, sous le regard étonné de l’employé de service assis devant son ordinateur.

La vessie soulagée (dans la bonne pièce), j’ai bien pris soin de ne pas raconter ma mésaventure à Béni, et nous sommes partis plein ouest pour aller rejoindre, au loin, la rivière Kokaigawa, en repassant par un bout de la Ring Ring Road.

Une maison abandonnée, le long de la Ring Ring Road. Sur tout l’archipel, il y en aurait environ 8 millions. Soit presque autant que la population du Québec…

Ici, un tracteur barrait la route à Béni-le-rouge. Le monsieur à la casquette noire nous a salués avec un sourire, et nous avons contourné l’obstacle tandis que Béni complimentait le tracteur pour son choix de couleur.

Béni fait la pause quelque part dans la campagne de Tsukuba, pour contempler les fleurs sauvages.

Parfois, le trajet du GPS nous fait traverser d’adorables sentiers pavés derrière les maisons.

À gauche, le mont Tsukuba, vu depuis la rivière Kokaigawa.

Représentation symbolique de la courbure de l’espace-temps découverte par Albert Einstein

  • Là tu divagues, ça doit être le soleil qui frappe un peu trop fort. Ton cerveau fléchit sous les rayons courbés du soleil.

La pause du midi, à l’ombre sous le toit d’une petite aire aménagée pour les cyclistes. Comme le banc était assez long, je me suis ensuite étendu pour roupiller un peu. S’étendre sur une surface de bois n’est pas très confortable, sauf si on garde son casque sur la tête… Curieusement, le casque procure presque le même confort qu’un oreiller en soulevant un peu la nuque du roupilleur.

Repus et ravigotés, nous avons entrepris la longue descente de la rivière Kokaigawa, en quittant parfois les abords de la berge.

Timide, un pêcheur se cache le visage derrière une branche.

La prise de photos s’est arrêtée là, parce que les gens de geopottering.com, partis de Tokyo le matin, m’avaient donné rendez-vous en fin d’après-midi quelque part en aval sur la rivière Kokaigawa, et qu’il a fallu rouler aussi vite que possible pour ne pas arriver en retard. Notre journée (à Béni et moi) s’est donc terminée avec ces passionnés de vélo, autour de quelques bières et de délicieuses pizzas maison cuites dans le jardin de notre hôte.



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