Petit billet sur les limites de la grosseur

Béni-le-rouge et moi avons roulé pas mal tous les jours cette semaine, généralement le ventre vide, tôt le matin, trouvant le jeûne intermittent plus facile à pratiquer pendant l’activité physique que devant l’ordinateur. Et nous avons pris quelques photos, ici et là.

Celle-ci montre une chenille (毛虫) en train de traverser la piste cyclable. Après avoir pris la photo, je l’ai partagée sur le groupe privé de Geo Pottering sur l’application Line, et 12 minutes plus tard un membre m’a informé qu’il s’agissait de セスジスズメ, donc de Theretra oldenlandiae, dixit Wikipédia.

Il y en avait pas mal ce jour-là sur la piste, dont quelques malchanceuses ayant péri sous les roues des cyclistes distraits, pressés ou cruels.

Ça m’a fait penser aux papillons, puis aux insectes en général, et je me suis demandé si, dans un monde sans mammifères, les insectes seraient plus gros qu’ils ne le sont aujourd’hui. Nous savons aujourd’hui que les grands mammifères n’ont pu proliférer sur la planète qu’une fois les dinosaures éteints, puisque jusque-là seuls les petits arrivaient à tirer leur épingle du jeu sous le règne de ces énormes reptiles. Mais sur une Terre sans dinosaures, ou, plus tard, sans mégafaune ni mammifères de la taille de ceux d’aujourd’hui, ou, si vous voulez, dans un monde sans vertébrés, je me demandais si les insectes auraient pu atteindre des tailles similaires. Comme ça, en roulant, je me posais la question…

Le mont Tsukuba à l’horizon de la petite rivière Kitauragawa (北浦川), photographié avec la rivière Kokagaiwa (小貝川) dans le dos. Matin du 19 août 2022 sous un ciel radieux.

De retour à la maison, j’ai fouillé un peu sur la Toile, persuadé que cette question avait déjà été posée des milliers de fois, et je suis tombé sur la réponse d’une biologiste, Adriana Heguy, qui, sans être spécialiste du sujet, donne quelques éléments de réponse pour les arthropodes.

Elle précise d’abord que la taille des animaux dépend de nombreux facteurs, et que les organismes ne sont pas qu’un simple assemblage de pièces, mais un système dont les composants doivent bien fonctionner ensemble pour être — plus ou moins — harmonieux.

Ceci étant dit, le premier grand facteur limitatif, c’est la lourdeur de l’exosquelette. D’une part parce que même les plus légers des exosquelettes sont plus lourds que les os des vertébrés (pourtant légers chez les oiseaux), et, d’autre part, parce que l’exosquelette doit recouvrir l’animal entier pour le protéger. Si un criquet ou une araignée avait la taille d’un humain, poursuit la biologiste, ses muscles ne pourraient pas supporter le poids de l’exosquelette, puisque la force relative des muscles diminue à mesure qu’ils grossissent. Autrement dit, comparé à un muscle deux fois plus gros que lui, le petit possède plus que la moitié de la force relative du gros. C’est la petite taille des insectes qui permet leur grande force musculaire.

Rivière Kokaigawa

Le deuxième grand facteur limitatif, c’est la mue. Dans la sélection naturelle et l’évolution des espèces, l’utilisation efficace de l’énergie (des calories disponibles) occupe une place prédominante. La mue requiert une très grande quantité d’énergie, sans parler de l’état de vulnérabilité auquel elle expose temporairement l’organisme. Un insecte de la taille d’un être humain se heurterait, du point de vue de la survie de l’espèce, à ces deux problèmes majeurs.

Sur la rive sud de la rivière Kokaigawa, se trouve un petit élevage de poneys (小貝川ポニー牧場)où quelques arbustes sont taillés sous des formes animales. Comme cet écureuil ne mordait pas, je suis descendu de vélo pour aller lui serrer la main.

Mais la question se pose : dans un monde sans dinosaures ni mégafaune carnivore, quelles seraient les limites physiologiques de la taille des rongeurs ?



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